Coûts de la surveillance

Contrôle d'un ouvrage hydraulique, dérivation d'un cours d'eau pour une ligne à grande vitesse (LGV SEA) en Charente

Contrôle de travaux

Contrôle d'un ouvrage hydraulique, dérivation d'un cours d'eau pour une ligne à grande vitesse (LGV SEA) en Charente

Coûts de la surveillance

11 décembre 2020 -
Dépenses liées à l'eau et aux milieux aquatiques
Coût de la surveillance des eaux
Le programme de surveillance, requis par la directive cadre sur l’eau (DCE), consiste à suivre l’évolution de l’état des eaux. Il vise à améliorer la connaissance de l’état des milieux aquatiques notamment en évaluant l’impact des activités humaines sur ce dernier. Cette surveillance a un coût pour les différents acteurs (services de l’État, établissements publics, etc.) qui la mettent en œuvre.

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La surveillance des eaux

La DCE demande aux « États membres [de veiller] à ce que soient établis des programmes de surveillance de l'état des eaux afin de dresser un tableau cohérent et complet de l'état des eaux au sein de chaque district hydrographique » (article 8). 

Pour les eaux de surface, il est demandé en particulier de suivre l’état écologique (ou le potentiel écologique), et l’état chimique. Pour les eaux souterraines, il est demandé de suivre l’état chimique et l’état quantitatif.

L’instauration de programmes de surveillance doit également permettre :

 • d’identifier les masses d’eau « à risque » de non-atteinte des objectifs environnementaux de la DCE,

 • de caractériser les pressions et de mesurer l’évolution de l’état des masses d’eau suite aux actions des programmes de mesures.

 

Ainsi, les programmes de surveillance, en plus d’améliorer la connaissance de l’état des eaux, contribuent à leur préservation et à la mesure de l’atteinte du bon état. 

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Les réseaux de contrôle de la surveillance des eaux

La surveillance des eaux s’effectue à travers plusieurs types de réseaux de contrôle :

  • le réseau de contrôle de surveillance (RCS) : réseau de stations contrôlées afin de connaître l’état des eaux de manière générale en France. Les stations de contrôle sont disposées de façon à assurer une représentativité de cet état.  Elles ont vocation à suivre de manière pérenne l’évolution de l’état quantitatif, chimique et écologique des masses d’eau. 

 

  • le réseau de contrôle opérationnel (RCO) : les stations de ce réseau ont pour objet de suivre les masses d’eau ayant été identifiées comme risquant ne pas répondre aux objectifs environnementaux fixés par la DCE. Ces contrôles sont liés à la mise en place des programmes de mesures mais sont destinés à s’arrêter une fois que la masse d’eau a atteint le bon état ou l’objectif défini, et cela, même si le programme de mesures est toujours en cours.  

 

  • le réseau de référence pérenne (RRP) : les stations de ce réseau sont placées sur des masses d’eau peu ou pas anthropisées. L’objectif du réseau est de mesurer l’impact des changements à long terme (changement climatique) sur les conditions de référence (c’est-à-dire non anthropisées). Ce réseau a été défini en 2012. 

 

  • les contrôles additionnels : contrôles supplémentaires effectués sur les zones protégées risquant de ne pas atteindre les objectifs environnementaux. Par exemple, les zones sensibles, les sites Natura 2000, les zones de captages d’eau de surface,…

 

  • les contrôles d’enquête : contrôles effectués de manière ponctuelle lors de pollutions accidentelles ou de non-respect des objectifs environnementaux afin d’en déterminer les origines. Ils sont déclenchés par les secrétariats techniques de bassin et alimentés par un comité de pilotage qui comprend, entre autres, les agences de l’eau et les missions interservices de l'eau (MISEN) concernées, l’AFB, la DREAL, la DDT…

 

Ces réseaux de contrôles constituent les réseaux instaurés dans le cadre de la DCE, ils sont actualisés après chaque état des lieux (2004, 2013, 2019). Tous les six ans, à la fin de chaque plan de gestion (2009, 2015, 2021, 2022, 2027), les données collectées sont rapportées à la Commission européenne.

Répartition des stations de suivi qualitatif des eaux superficielles (RCS) par district hydrographique

Répartition des stations de suivi qualitatif des eaux superficielles (RCS) par district hydrographique

En plus de ces réseaux, des réseaux complémentaires peuvent être définis par les bassins afin d’apporter un suivi supplémentaire aux réseaux dits « DCE ». Ces réseaux complémentaires sont variés, ils peuvent être mis en place à l’échelle d’un bassin ou à un niveau plus local, pour suivre une thématique spécifique ou non.

Ils peuvent, par exemple, être adoptés pour déterminer si l’état de l’eau est compatible avec la baignade ou la conchyliculture. Ils peuvent également servir à alimenter les observatoires de la qualité de l’eau dans le cadre de schémas d’aménagement des eaux (SAGE) ou de contrats de rivière.

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La multitude d’acteurs impliqués dans la surveillance des eaux

Les programmes de surveillance impliquent la participation d’une multitude d’acteurs à qui sont confiées un certain nombre de missions définies dans le schéma national des données sur l’eau.

Des missions d'opérations de terrain (prélèvements d’eaux ou d’organismes biologiques, analyses...) ou de rapportage aux différentes instances (commission de bassin, ministère, commission européenne) sont par exemple définies. 

Ainsi, la récolte et la bancarisation des données sont effectuées par les agences et offices de l’eau via des marchés avec des laboratoires. Le rapportage est réalisé par les agences et offices de l’eau sous le pilotage de l’Office français de la biodiversité (OFB). D’autres acteurs, comme AQUAREF, participent également à la surveillance en appuyant et en développant des méthodes pour fiabiliser la chaîne d’acquisition de données.

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La représentativité de la station de surveillance

Afin de pouvoir exploiter la mesure de terrain dans le cadre de l’évaluation de l’état des eaux, les sites de suivi doivent être disposés sur des tronçons représentatifs de l’état de l’ensemble de la masse d’eau, c’est-à-dire représentatifs de l’état général des eaux à l’échelle de la masse d’eau, et non pas à une échelle locale (arrêté du 25 janvier 2010 relatif aux méthodes et critères d’évaluation de l’état écologique, de l’état chimique et du potentiel écologique des eaux de surface).

La représentativité est évaluée par un croisement de l’échelle masse d’eau et de l’échelle tronçon et par l’étude de facteurs spatiaux. Des méthodes ont été développées afin de déterminer des tronçons homogènes pour choisir ces stations représentatives.

Ainsi, le site doit par exemple se trouver en dehors de rejets ponctuels ou en dehors de singularités morphologiques d’origine humaine ayant des impacts locaux et sans incidence sur le fonctionnement général de la masse d’eau.

Le site de suivi doit permettre de traduire de manière générale, à l’échelle de la masse d’eau, les incidences écologiques et/ ou chimiques des éventuelles pressions qui s’exercent sur la masse d’eau.

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Coût de la surveillance

Les dépenses de surveillance (métropole et départements d’outre-mer) se chiffrent à 122 millions d’euros sur la période couvrant 2007-2010, soit un coût moyen de 30,5 millions d’euros hors taxes par an.

Elles ont été estimées en 2011 par la direction de l’eau et de la biodiversité (DEB) du ministère en charge de l’écologie à l’occasion d’une évaluation des coûts de la surveillance dans le cadre de la DCE en France.

À ces coûts s’ajoutent les 59 millions d’euros liés aux réseaux complémentaires et, depuis 2008 et l’instauration de la Directive Cadre Stratégie pour le Milieu Marin (DCSMM), les coûts liés à la surveillance des eaux marines (s’étalant des eaux côtières à la limite de la zone économique exclusive). 

L’élaboration des programmes de mesures des agences de l’eau s’appuie, en partie, sur les données recueillies et sur la connaissance de l’état des masses d’eau fournie par les programmes de surveillance.

 

Mis en parallèle, on remarque que le coût des programmes de surveillance représente moins de 1 % du coût des programmes de mesures (27 milliards d’euros TTC pour la période 2010-2015). Le coût des programmes de surveillance est donc relativement faible en comparaison de son apport à la politique de gestion de l’eau. Bien connaître la situation écologique des milieux aquatiques permet la mise en œuvre d’une politique ciblée sur les milieux qui en ont besoin et évite la mise en place de mesures inadaptées et donc coûteuses. 

Les coûts estimés ont été récoltés par la DEB via des questionnaires envoyés aux secrétariats techniques de bassins. Ils ont été calculés sur une année et donnés en milliers d’euros hors taxes. Ils correspondent à la somme de l’ensemble des coûts liés aux différentes opérations de production de la donnée. Cela signifie que les coûts estimés tiennent compte – pour chaque paramètre nécessaire à l’évaluation de l’état de la masse d’eau – des coûts de prélèvement, de tri, de détermination et d’analyse.

Par ailleurs, si le bassin a eu recours à un prestataire pour mener à bien le programme de surveillance, alors le coût du ou des marchés a également été intégré. Pour les opérations menées en régie, les coûts des équivalents temps plein (ETP), c’est-à-dire du personnel mobilisé pour la production de la donnée ainsi que les frais de missions associés ont été ajoutés.

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Le détail des coûts selon les bassins, les types de contrôles et la catégorie d’eau

a. Une disparité des coûts selon les bassins

Les bassins hydrographiques ne supportent pas tous les mêmes coûts en terme de surveillance au sens de la DCE. 

Illustration : coût moyen annuels (2007-2010) de la surveillance DCE par bassin

Coût moyen annuels (2007-2010) de la surveillance DCE par bassin

Coût moyen annuels (2007-2010) de la surveillance DCE par bassin

Le coût de la surveillance s’élève, en moyenne, à plus de 8 millions d’euros et plus de 7 millions d’euros par an pour les bassins Loire-Bretagne et Rhône Méditerranée Corse contre environ 1 million d’euros pour la Réunion, la Guyane et le bassin Artois-Picardie.

Cependant, comparer les coûts entre les bassins n’a que très peu de sens compte tenu des grandes différences entre les bassins du territoire français (superficie, nombre de masses d’eau, catégories d’eau, etc.).

En rapportant les coûts annuels de la surveillance à la surface en km² de territoire de chacun des bassins, on s’aperçoit que la surveillance est relativement plus coûteuse dans les DOM.

 

C’est tout particulièrement vrai pour la Réunion et la Martinique, départements pour lesquels le coût de la surveillance s’élève à plus de 150€/km²/an sur la période 2007-2010 (contre autour de 50€/km²/an en moyenne pour les autres bassins).

Cette différence de coût s’explique en partie par les coûts liés à l’analyse des eaux. Par exemple, certains échantillons sont envoyés en métropole pour être analysés. La difficulté d’accès à certaines masses d’eau peut également expliquer cet écart de coûts. 

Illustration : coûts moyens annuels de la surveillance DCE par bassin et km2 de territoire

Coûts moyens annuels de la surveillance DCE par bassin et km2 de territoire

Coûts moyens annuels de la surveillance DCE par bassin et km2 de territoire

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Les coûts selon les réseaux et les types de contrôle

Près de 80% des coûts de surveillance sont liés au réseau de contrôle de surveillance contre 21% pour les contrôles opérationnels et moins de 1% pour les contrôles enquêtes et les contrôles additionnels. Ce grand écart de coût se justifie par la nature et l’objectif des contrôles. 

Les contrôles de surveillance visent à suivre sur le long terme l’état des masses d’eau, il s’agit de stations pérennes et non ponctuelles comme pour les contrôles opérationnels et d’enquête. De plus, les contrôles opérationnels ont été instaurés de manière progressive, en suivant la mise en œuvre des programmes de mesures. Ils ont donc continué à se développer après 2010, modifiant probablement la répartition ci-dessus, estimée en 2011. 

Enfin, certaines stations participent au suivi de plusieurs types de contrôles à la fois. Afin de ne pas comptabiliser certains coûts en double, l’estimation ne comptabilise que les coûts opérationnels complémentaires lorsque la station opère un contrôle de surveillance et un contrôle complémentaire.

De manière similaire, les contrôles additionnels sont généralement réalisés sur des masses d’eau où des contrôles opérationnels sont déjà en place ce qui limite les coûts qui leur sont associés.

Illustration : répartition des coûts nationaux en moyenne annuelle (2007-2010), par type de contrôle DCE

Répartition des coûts nationaux en moyenne annuelle (2007-2010), par type de contrôle DCE

Répartition des coûts nationaux en moyenne annuelle (2007-2010), par type de contrôle DCE

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Les réseaux complémentaires

Les réseaux DCE ne suffisent pas, à eux seuls, à caractériser l’état de l’ensemble des masses d’eau. Il est nécessaire de maintenir des réseaux complémentaires et de mobiliser les connaissances qu’ils permettent d’acquérir.

Ces dernières servent à la fois :

- à préciser les données recueillies par les réseaux DCE ;

- à répondre à des objectifs de connaissance et de gestion locale ;

- à permettre de mieux comprendre et connaître les masses d’eau ciblées. 

 

Ces contrôles complémentaires consistent généralement à ajouter de nouveaux sites d’études. Ces sites peuvent être, par exemple, directement liés à une pression ou une pollution identifiée sur une masse d’eau afin de mesurer les effets des actions mises en œuvre pour la réduire.

De nouveaux sites de surveillance peuvent également permettre d’évaluer l’état des eaux à une échelle plus locale ou de s’assurer de la non-dégradation d’une masse d’eau en très bon état. En effet, la DCE impose l’atteinte du bon état pour toutes les masses d’eau, ce qui implique à la fois un travail d’amélioration de l’état mais aussi un effort de maintien du bon état dans les cas où il est atteint. 

 

Les coûts par catégories d’eau

Entre 2007 et 2010 près de 80% des coûts liés à la surveillance concernaient la surveillance d’eaux de surface dont ¾ de cours d’eau. 
 

Coût moyen annuel, tous réseaux DCE, par catégorie d'eau

Coût moyen annuel, tous réseaux DCE, par catégorie d'eau

Le coût par type d’eau est à mettre en regard avec le nombre de masses d’eau par catégorie d’eau. En effet, les cours d’eau représentent à eux seuls près de 90% du nombre total de masses d’eau.

Ainsi, en regardant le coût de surveillance rapporté à une masse d’eau, on remarque que les cours d’eau font partie des catégories les moins coûteuses à surveiller.

A l’inverse les eaux souterraines, les eaux côtières et les eaux de transitions sont des catégories d’eau qui nécessitent une mobilisation de moyens plus importante.

Illustration : coût global de la surveillance d'une masse d'eau par catégorie et par an

Coût global de la surveillance d'une masse d'eau par catégorie et par an

Coût global de la surveillance d'une masse d'eau par catégorie et par an

Rapporté au nombre de masses d’eau, les coûts de la surveillance des eaux côtières, de transition et souterraines sont plus élevés, les masses d’eau étant plus étendues et le recours à des équipements plus coûteux – des bateaux étant requis – expliquent cette différence. 

Sources :

• Bilan des coûts de la surveillance menée au titre de la DCE, MEEM/DEB, 2011
• Circulaire du 29 janvier 2013 relative à l’application de l’arrêté du 25 janvier 2010 modifié établissant le programme de surveillance de l’état des eaux, pour les eaux douces de surface, MEDDE, 2013
• Révision de la stratégie de surveillance des eaux en France, CGDD, Ministère en charge de l’écologie, 2013